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10 février 2013 7 10 /02 /février /2013 14:51

pit

Si la pluie glaciale de février ne s’arrête pas, si votre chéri est parti au Laos, si votre avion ne décolle pas à cause de la neige, si vous en avez marre de tous les intégrismes, des insanités du cardinal sur vos amis gays, des converties burqhéées haussant les épaules devant les Tunisiens en deuil de Chokri Belaïd, faites vous un bon chocolat ou un café de Atoyac et  glissez vous sous la couette avec ce Thriller « à quatre mains »de Paco Ignacio Taïbo II et Sous-commandant Marcos.
Je sais il date un peu : 2005, traduit l’année suivante en français, publié chez Payot-Rivages . Le pseudo libraire de mon quartier qui dit « mais c’est vieux ça! » quand je lui demande un livre publié depuis un mois, parlerait de la nuit des temps…Mais celui-là vous emmènera au bout de la nuit. Du rire à l’émotion et derrière chaque chapitre vous sentirez la patte de l’un et l’autre auteur. Faussement naïf à philosophique du  Sup. Finement intime, incroyablement baroque et puissammment rabelaisien du maître du Polar mexicain.
Mais le tissu historique et social mexicain , oui bien « el tejido », est là, support d’une densité et d’une variété palpable étonnante, à la merci du « mal et du méchant. »


C’est bien de cela qu’il s’agit et deux enquêteurs l’indigène Elias Contrarios, (ainsi nommé par Marcos à cause de son esprit de contradiction) rencontrant au Monstre (la ville de Mexico) le célèbre détective borgne et boiteux de Paco Ignacio Taïbo II,  Hector Belascoaràn Shayne, ne seront pas de trop pour découvrir les multiples visages du méchant.
Elias, mandaté par Marcos, depuis les Montagne du Sud - Est Mexicain « presque au coin du Guatemala» mentionne la carte de visite qu’il se fera imprimer à Mexico, doit rencontrer Hector buveur de Coca, pour retrouver certain Moralès fort méchant. Impliqué dans « la guerre sale » qui après 68 a liquidé de nombreux défenseurs des droits,  insurgés, prisonniers, en attribuant leur liquidation aux zapatistes, aux indigènes, à des adversaires politiques. En 97 Au massacre d’indigène dans l’église d’Acteal (l’Oradour des Chiapas) le revoilà. Profitant du chaos du tremblement de terre de 85 il a pillé  immeubles et habitations. Naturellement il est lié au Yunque (enclume) groupe d’extrême droite mexicain et aux fascistes espagnols.Et bien sûr quand commence le pillage de la Biodiversité de la forêt Lacandon,  abri  naturel des zapatistes,  Moralès est toujours là.
En fait cet inquiétant personnage couvre  40 ans de la vie politique du Mexique.  Un sujet que connaissent parfaitement -et de l’intérieur- autant Marcos que Taïbo II. Ce qui autorise l’indignation légitime, par détectives interposés.
Car Moralès est lié aux plus hauts de l’Etat. Les assoiffés de pouvoir capables de tout  pour y accéder et d’encore plus pour se maintenir. Passant de la direction politique à celle de lobbies industriels, toujours protégés quels que soit leurs forfaits. A l’abri dans les pays européens une fois à la retraite.


A l’époque où l’on voit Harvard accueillir l’ex- président Calderon,  comme professeurn alors qu’une pétition de 33 000 signature l’attend au Tribunal de La Haye pour les 66 0000 crimes commis sous son mandat et impunis, on voit que peu de choses ont changé, au Mexique depuis 68.
On a vu Don  Nepo accusant les militaires assassins de son fils devant Calderon , assassiné ensuite à quelques pas du Ministère.
On a vu pas plus tard qu’hier Itzi-Guari et Jorge Danton, deux avocats défenseurs des  jeunes manifestants du 1 Décembre dernier, battus et Jorge enlevé par la police dans le centre historique de Mexico.
On  a vu l’enfumage du Cas Cassez faisant  passer la pilule des privatisations du patrimoine énergétique mexicain, par le nouveau gouvernement. Ainsi que le problème des fraudes électorales.
Des étudiants à Sinaloa, à Oaxaca et Veracruz sont toujours arrêtés lorsqu’ils manifestent. Les Cies minières canadiennes empoisonnent toujours les sites sacrés de Wirikuta et de Guerrero et les générations à venir. La forêt de Cheran et d’ailleurs, est honteusement pillée, et devant l’inertie gouvernementale, les communautés s’érigent en entités administratives propres (Cheran) ou en milices armées.
Le peuple harassé en a assez des abus et réagit au niveau local. Cette micro-résistance relayée et fédérée par les réseaux sociaux, rejoint l’esprit zapatiste, décrit avec précision et amusement par Marcos lui-même. La résistance surgit là où on ne l’attend pas. Magdalena la transexuelle, fille adoptive en quelque sorte d’Elias. Ou cette Hackeuse indienne, Natalia,  passée aux USA pendant la seconde guerre mondiale, qui parvient à intercepter un système de satellites espions US et leur envoie un virus à travers l’intégral des chansons de Cricri célébrissime auteur compositeur et interprète pour enfants. « Les américains accuseront Al-Quaïda et Bush devra réorganiser les services secrets! » Tandis que
d’autres comme Russe le maoïste vendent des « tortas organicas »  tandis que le Chinois Trotskyste  vend des meubles. Tous deux attendent  de Marcos autre chose que « d’écrire des romans et de contes pour enfants à la con: il ferait mieux de nous parler de la suite ». La Tchéchène, Fleur, « apporte les tortas « rescapées »(ie bio)du Russe aux jeunes alter-mondialistes arrêtés » Pour que , bien nourris, ils puissent résister à la prison. Une petite zapatiste de onze ans qui triche sur son âge fournit des chewing-gums qui collent aux latrines les gardes du corps de Moralès.
Elias prend sagement des notes dans son cahier, sur les mots « susdit », « perspective » et transmet à son commando. Les messages de Marcos lui arrivent par les moyens les plus improbables et les plus inventifs.  « ils m’ont donné des chaussures qui me faisaient mal au pied. J’ai enlevé le papier, c’était le message du Sup. »
Les perles ne manque pas. Marcos comme Taïbo II sont de joyeux drilles. On le savait du second. Alors que le premier sous la plume de ce véreux de La Grange (journaliste au Monde, surtout attaché à ses privilèges!) a été présenté à la limite de la niaiserie idéologique. Mais l’humour du Sup qui glisse ça et là des petites auto-piques, paraît aussi à la première personne à travers la lenteur apparente d’Elias. La pipe en miette après une chute, les discours philosophiques du Sup menant à des dégâts matériels et chutes des corps, dont le sien. Ailleurs il se montre plus sérieux sur les notions de haut et de bas, rénovant la métaphore cosmogonique du bien et du mal.

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Elias découvre le Monstre, ses boites aux lettres très différentes de celles des Chiapas où l’on dépose provisions, médicaments, livres. Ses restaurants, cantinas, pharmacies, monuments. Hector lui le titille avec Pancho Villa et Zapata. Mais le duo improbable retrouvera bien sûr qui se cache derrière les enregistrements qu’un mort adresse à ses anciens amis et qui l’a assassiné.

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Hector lui est un lecteur boulimique, qui associe la 8 eme de Malher à « la plus déroutante et la plus secouée des villes ». « Ce chant à la grandeur des êtres humains, où Belascoaràn reconnaissait sa propre intuition personnelle face aux misères de la ville ».
Cette symphonie est liée à une femme « dont l’absence l’obsédait comme une séquence de film, quand il se lavait la figure, mangeait des tacos ou écoutait du Malher. »
Des Chiapas à la Torre Latino-Americana, « gratte ciel qui n’est plus ce qu’il était, » dépoussièrant les clichés, s’amusant avec d’autres, révélant beaucoup, Paco Ignacio Taïbo II et Marcos nous ont offert un roman couillu et tendre, intime dans le démesuré DF, livre médecine en quelque sorte que le vieil Antonio ne rejetterait pas. Pour nous garantir du froid de l’histoire comme de celui de la météo hivernale.
Cosa Facil?

Ci-dessous de Cri Cri Los colchinitos dormillones qui réjouira petits et grands (garanti sans virus). Je dédie cette écoute aux honorables auteurs des Morts qui dérangent et à un petit garçon portant le même prénom que le Sub...

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